mardi 30 juin 2015

Appliquer une convention de forfait illicite ne signifie pas automatiquement travail dissimulé

À l’occasion d’un litige relatif à une convention de forfait annuel en heures, la Cour de cassation rappelle qu’un employeur ne peut pas être condamné pour travail dissimulé si le « caractère intentionnel » de l’infraction n’est pas établi. Or, le seul fait d’appliquer une convention de forfait illicite ne révèle pas cet élément intentionnel.

Pas de travail dissimulé sans caractère intentionnel. - Diverses situations peuvent constituer du travail dissimulé et notamment le fait de mentionner sur un bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli (c. trav. art. L. 8221-5).  
L’employeur n’encourt toutefois une condamnation que s’il s’est ainsi abstenu volontairement de remplir ses obligations en la matière. En d’autres termes, le caractère intentionnel de l’infraction doit être caractérisé.   
À titre d’exemple, la seule absence de mention d’heures supplémentaires sur des bulletins de salaire n’entraîne pas une condamnation pour travail dissimulé. Faut-il encore que cette abstention résulte d’une volonté délibérée de l’employeur (voir Dictionnaire Social, « Travail dissimulé »).
Le cas échéant, l’employeur risque notamment d’avoir à payer une indemnité forfaitaire au salarié employé dans ces conditions et dont le contrat de travail est rompu (c. trav. art. L. 8223-1).

Convention de forfait annuel en heures en cause. - En l’espèce, le salarié, guide accompagnateur, relevait d’une convention de forfait annuel en heures. Suite à sa démission, il a saisi les juges pour obtenir un rappel de salaire notamment au titre d’heures supplémentaires ainsi qu’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.
Il était certes établi que l’accord collectif d’entreprise instituant le forfait en cause n’était pas valable. Pour autant, selon la Cour de cassation, le caractère intentionnel, sans lequel il n’y a pas de travail dissimulé, ne pouvait pas se déduire de la seule application d’une convention de forfait illicite. Elle applique ainsi le même type de raisonnement que pour toutes ses décisions en matière de travail dissimulé. À noter également que la logique est la même que l’affaire soit tranchée par un juge pénal ou un juge civil.

L’employeur n’aurait donc pas dû, en l’espèce, être condamné pour travail dissimulé alors que cet élément intentionnel n’était pas caractérisé. L’affaire sera à nouveau jugée sur ce point.

Information partagée par Alain Maspataud.
  
Secrétaire du Comité d’Etablissement de Rueil Malmaison
Secrétaire-adjoint du C.H.S.C.T de Rueil Malmaison



Congé de formation économique, sociale et syndicale : le Gouvernement veut favoriser le maintien de la rémunération

La question de l’indemnisation du congé de formation économique, sociale et syndicale a été introduite dans le projet de loi sur le dialogue social par un amendement du gouvernement lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale (voir Dépêche Paye du 21 mai 2015). Alors que le projet de loi est en cours d’examen au Sénat, un nouvel amendement du gouvernement vise à favoriser, au profit des salariés en congé, le maintien de tout ou partie de leur rémunération par l’employeur. Ce dernier se ferait ensuite rembourser par les organisations syndicales ayant demandé le maintien, avec possibilité de retenues sur les salaires en cas de défaillance des organisations.

Depuis le 1er janvier 2015, le maintien de la rémunération n’est plus obligatoire. - Depuis le 1er janvier 2015, l’indemnisation du congé de formation économique, sociale et syndicale est assurée au moyen des crédits du fonds paritaire spécifique dédié au financement des organisations syndicales de salariés et d’employeurs. Les employeurs ne sont plus tenus de maintenir la rémunération du salarié (loi 2014-288 du 5 mars 2014, art. 31-V, JO du 6).
Rappelons qu’avant cette date, dans les entreprises de 10 salariés et plus, l’employeur était tenu de rémunérer ce congé dans la limite de 0,08 pour mille du montant des salaires payés pendant l’année en cours (c. trav. art. L. 3142-8 abrogé et R. 3142-1). Les dépenses correspondantes étaient imputables sur la participation à la formation professionnelle continue, et ce jusqu’à la collecte 2015 (participation 2014).

Amendement déjà adopté à l’Assemblée nationale : le maintien de rémunération serait une simple option. - Suite à un premier amendement du gouvernement adopté lors de son passage à l’Assemblée nationale, le projet de loi, dans son état actuel, ouvre la possibilité aux organisations syndicales et aux employeurs qui le souhaitent de conclure des conventions de maintien de la rémunération au profit des bénéficiaires du congé.
Ces conventions pourraient prévoir que le coût de ce maintien serait supporté par l’employeur, l’organisation syndicale ou réparti entre eux. Elles pourraient également prévoir le maintien des cotisations sociales afférentes au salaire. Dans tous les cas, elles définiraient les conditions et modalités du maintien de salaire, du remboursement et de la retenue sur salaire à laquelle l’employeur pourrait procéder, dans des limites fixées par décret, si l’organisation syndicale ne se conforme pas à son engagement de remboursement (projet de loi dans sa version adoptée à l’Assemblée nationale le 2 juin 2015, art. 18-II).
Ainsi, l’ancien article L. 3142-8, abrogé par la loi du 5 mars 2015, serait rétabli et modifié.

Amendement à examiner par le Sénat : le maintien de tout ou partie de la rémunération serait de droit… sous conditions. - Le « nouvel » amendement déposé par le gouvernement le 23 juin 2015, au cours de l’examen du texte en séance publique par le Sénat, vise à faciliter le développement du dispositif de subrogation. L’article L. 3142-8, déjà « rétabli » par l’Assemblée nationale, serait aménagé en conséquence.
Ainsi, le maintien de tout ou partie de la rémunération serait de droit, si une organisation syndicale en fait la demande, dès lors qu’elle est constituée depuis au moins 2 ans dans le champ couvrant l’entreprise ou l’établissement et qu’elle satisfait aux critères d’indépendance et de respect des valeurs républicaines.
La demande du syndicat préciserait le niveau demandé du maintien de rémunération.
L’employeur devrait maintenir les cotisations et contributions sociales afférentes à la rémunération maintenue.
Une convention conclue entre l’organisation syndicale et l’employeur fixerait le montant que le syndicat rembourserait à l’employeur et le délai dans lequel ce remboursement serait effectué. À défaut de convention, la demande de l’organisation syndicale l’engagerait à rembourser la totalité du montant maintenu, y compris le montant des cotisations et contributions sociales afférentes à la rémunération, dans un délai à définir par décret en Conseil d’État.
En cas de non-remboursement, l’employeur pourrait procéder à une retenue sur le salaire du bénéficiaire, dans les conditions et les limites à prévoir par décret en Conseil d’État.
Reste à savoir si cet amendement sera retenu par le Sénat, qui devrait poursuivre l’examen du projet de loi jusqu’au 30 juin 2015.
Projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, actuellement en cours d'examen au Sénat (art. 18 II) ; amendement du gouvernement n° 316 déposé le 23 juin 2015 http://www.senat.fr/amendements/2014-2015/502/Amdt_316.html

Information compilée par Alain Maspataud

Secrétaire du Comité d’Etablissement de Rueil Malmaison
Secrétaire-adjoint du C.H.S.C.T de Rueil Malmaison