jeudi 27 août 2015

La victime d’un harcèlement peut prendre acte de la rupture de son contrat même après une longue absence de l’entreprise

Est justifiée la prise d’acte, par une salariée victime d’un harcèlement moral, de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur, dès lors que ce dernier n’a pris aucune mesure pour faire cesser le harcèlement, et que les agissements en cause sont susceptibles de recommencer, l’employeur n’ayant pas licencié leur auteur. Peu importe que la salariée, en congé de maternité puis en congé parental, ne subissait plus depuis plusieurs mois ces agissements. C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt non publié du 8 juillet 2015.
La Cour de cassation retient dans un arrêt du 8 juillet 2015 qu’un harcèlement moral toléré par l’employeur justifie la prise d’acte par sa victime de la rupture de son contrat de travail, même si celle-ci ne subissait plus depuis plusieurs mois les agissements reprochés en raison d’un congé de maternité puis parental.
Dans cette affaire, une salariée, en arrêt de travail depuis le 3 juillet 2010 en raison d’un congé de maternité puis d’un congé parental dont le terme est prévu le 30 avril 2011, prend acte le 26 avril 2011 de la rupture de son contrat de travail en invoquant un harcèlement moral de la part de son supérieur hiérarchique. La salariée ayant saisi la justice, la cour d’appel décide que la prise d’acte est justifiée, et qu’elle produit les effets d’un licenciement nul en raison de ce harcèlement.
L’employeur forme un pourvoi en cassation pour contester la nullité de la rupture. Il observe notamment que la salariée avait remis sa démission motivée le 26 avril 2011, alors même qu’elle "n’avait plus de contact avec l’entreprise depuis plusieurs mois" et qu’elle "n’avait pas estimé devoir rompre le contrat de travail avant le 3 juillet 2010", date de début de son absence de l’entreprise. L’employeur reproche à la cour d’appel d’avoir estimé que la salariée "était fondée à prendre acte de la rupture de son contrat de travail le 26 avril 2011, cependant que cette dernière ne subissait pas, depuis plusieurs mois, les agissements de harcèlement moral dont elle disait avoir fait l’objet, en raison de son absence de l’entreprise pour un motif totalement étranger à ce prétendu harcèlement moral".
Aucune mesure pour faire cesser le harcèlement
La Cour de cassation censure cette analyse et valide la nullité de la rupture. Pour les hauts magistrats, "la cour d’appel, après avoir jugé que la salariée avait été victime de faits répétés de harcèlement moral, a constaté que l’employeur, bien qu’informé de tels faits n’avait pris au jour de la rupture aucune mesure pour les faire cesser et que la salariée pouvait légitimement craindre la perpétuation des agissements de harcèlement moral lors de son retour dans l’entreprise où l’auteur du harcèlement pouvait toujours se manifester puisque l’employeur ne s’était pas encore décidé de le licencier". La cour d’appel "a pu en déduire que cette situation rendait impossible la poursuite de la relation contractuelle".

Cass. soc., 8 juillet 2015, n° 14-13.324

Information colligée par Alain Maspataud,

Secrétaire du Comité d’Etablissement de Rueil Malmaison
Secrétaire-adjoint du C.H.S.C.T de Rueil Malmaison




Proposer un poste changeant l'organisation du travail et le rattachement hiérarchique est une modification du contrat


Caractérise une modification du contrat de travail le fait de proposer à un chef de projet au sein de la direction des ressources humaines, des postes de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services ou de manager de région alimentaire, dès lors que ces postes sont soumis à une nouvelle organisation du travail et à un autre rattachement hiérarchique. Cette modification contractuelle est soumise à l’accord du salarié. C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt du 8 juillet 2015.
Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement d’un chef de projet RH pour avoir refusé des postes de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services ou de manager de région alimentaire. Cette proposition constitue en effet une modification du contrat de travail dès lors que ces postes sont soumis à une nouvelle organisation du travail et à un autre rattachement hiérarchique. C’est ce que juge la Cour de cassation dans un arrêt du 8 juillet 2015.
Dans cette affaire, un chef de projet employé au sien de la direction des ressources humaines de la société Monoprix est licencié pour avoir refusé deux propositions de poste, celui de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services et celui de manager de région alimentaire. Le salarié soutient que ces propositions de mutation emportaient modification de son contrat de travail et qu’il était en droit de les refuser, dès lors qu’elles correspondent à un changement de ses fonctions et de sa rémunération variable.
Missions nécessairement différentes
La cour d’appel donne raison au salarié et juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse, approuvée par la Cour de cassation. Selon les constatations de la cour d’appel, "les missions proposées au salarié en qualité de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services et de manager de région alimentaire étaient nécessairement différentes de celles occupées sur le poste de chef de projet dès lors" que l'intéressé "était soumis à une nouvelle organisation et à un autre rattachement hiérarchique caractérisant ainsi une modification du contrat de travail". Dès lors, la cour d’appel "a légalement justifié sa décision".

Cass. soc., 8 juillet 2015, n° 14-10.356

Information colligée par Alain Maspataud,

Secrétaire du Comité d’Etablissement de Rueil Malmaison
Secrétaire-adjoint du C.H.S.C.T de Rueil Malmaison